Avant l’arrivée de la relativité restreinte, les physiciens considéraient le temps comme Newton l’avait décrit :  » Absolu,un temps vrai et mathématique, valant en soi, et à partir de la propre nature duquel, il s’écoule également, sans considération pour aucune chose extérieure. » Or il y a environ 112 ans, un employé jusque-là inconnu du bureau des brevets en Suisse, Albert Einstein publia un célèbre article contenant une nouvelle théorie. On l’appela la théorie de la relativité. Et comme l’affirmait Einstein, l’étape clef du développement de la théorie de la relativité avait été de repenser le temps.

Une rupture entre un temps absolu et un espace-temps relatif

En 1905, Einstein a défini la théorie de la relativité restreinte, qui expliqua les résultats de l’expérience de Michelson-Morley qui montrait que la vitesse de la lumière est la même où que l’on soit dans l’univers faisant remarquer que toute idée disant que les ondes électromagnétiques se déplaçaient à travers une substance appelée  »éther » présente partout,était inutile. En effet, cette théorie avait comme idée fondamentale que les lois de la physique devaient être les mêmes pour tous les observateurs se mouvant librement quelle que soit leur vitesse. Cette notion qui semble très simple a pourtant eu des conséquences remarquables comme celle de l’équivalence de la masse et énergie, résumée dans la brillante équation d’Einstein : E= mc² ( où E est l’énergie, m est la masse et c la vitesse de la lumière) et la loi qui dit que rien ne peut se déplacer plus vite que la lumière.

On sait que l’énergie qu’un objet possède en raison de son mouvement augmentera sa masse et donc qu’il sera plus difficile pour lui d’augmenter sa vitesse. Cet effet n’est réellement significatif que pour des objets se déplaçant à des vitesses proches de celles de la lumière, si la vitesse de celui-ci approche de la vitesse de la lumière, sa masse augmentera de plus en plus vite, de telle sorte qu’il aura besoin de plus en plus d’énergie pour aller plus vite. Atteindre la vitesse de la lumière impliquerait avoir une masse infinie et donc une quantité d’énergie infinie, soit impossible pour tout objet normal.

Mais le plus remarquable est la révolution qu’elle a semée dans nos idées sur l’espace et le temps, démolissant l’idée que le temps était une constante universelle. En effet celle-ci dit que plusieurs observateurs dans différentes places dans le monde seraient d’accord sur la vitesse de la lumière mais pas sur la distance parcourue et la durée du trajet. Cette démonstration est alors différente que celle émise par Newton qui en utilisant le concept de temps absolu, dirait que les observateurs ne seraient pas d’accord sur la distance parcourue mais le seront pour la durée du trajet. Or la vitesse est : v=d/t ; donc s’il ne sont pas d’accord sur la durée ils ne devraient pas être d’accord sur la vitesse de la lumière également. Cet remarque est prouvé fausse par l’expérience de Michelson-Morley. La relativité finit donc par nous dire que chaque observateur a sa propre mesure du temps : t= (Δt/2)c. Ainsi tout observateur peut trouver précisément le temps et la position que tout autre observateur assignera à l’événement, pourvu qu’il connaisse sa vitesse relative.

Nous devons ainsi accepter que le temps ne soit pas complètement différent de l’espace mais qu’ils se combinent pour ne former qu’un :  »l’espace-temps ». Nous savons donc que l’on peut définir un point grâce à trois coordonnés( sa longueur, sa largeur et sa hauteur), ainsi nous devons définir un événement, qui se passe à un endroit donné et un moment donné dans l’espace avec quatre coordonnés ( ses caractéristiques spatiales et sa caractéristique temporelle). On dit alors qu’on caractérise sa position dans un espace à quatre dimensions appelé  »espace-temps ».

Utilisant cela,nous pouvons considérer que la lumière issue d’un événement forme un cône à trois dimensions dans l’espace-temps appelé cône de lumière future, de même on peut définir : un cône de lumière passé. Les cônes de lumières passés et futurs d’un événement P divisent l’espace-temps en 3 régions. Le  »futur absolu » de l’événement est la région intérieure du cône de lumière future P. C’est l’ensemble de tous les événements qui peuvent être atteints par les signaux venant de P . Le  »passé absolu » de P est la région à l’intérieur du cône de lumière passée. C’est donc l’ensemble de tous les événements qui peuvent affecter ce qui arrive en P. Si l’on connaît ce qui arrive à tout instant particulier partout dans la région de l’espace qui s’étend à l’intérieur du cône de lumière passée de P, on peut prédire ce qui arrivera en P. «L’ailleurs» est la région de l’espace-temps qui ne s’étend pas dans aucun des cônes de lumière, passé ou futur, de P. Les événements dans l’ailleurs ne peuvent affecter les événements en P, ni en être affectés.(voir figure ci-dessous).

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Cone de Lumière publié dans lacosmos.com

Mais il y avait toujours un aspect qui dérangeait beaucoup Einstein et la communauté scientifique, ce qui rendait cette dernière un peu réticente à propos de cette nouvelle théorie. En effet, la relativité restreinte était  »incompatible » avec la théorie de la gravitation, qui dit que les différents corps s’attirent selon une force qui fonctionnaient en fonction de leur distance et de leur masse. Cela voulait ainsi dire que si l’on modifiait la distance entre eux, la force changerait également, ce qui impliquerait que les effets gravitationnels voyageraient  à une vitesse infinie. Petit problème, la théorie de la relativité restreinte exigeait que celles-ci voyagent à une vitesse inférieure ou égale à celle de la lumière comme on indiquait au début de cette partie. Suite à six ans de recherches (entre 1908 et 1914) pour essayer de trouver une compatibilité entre ses deux théories fondamentales de l’espace, le 25 novembre 1915, Albert Einstein présenta ses «équations du champ de gravité» devant l’Académie Prussienne des sciences. Peu de temps après 4 pages d’équations sont publiés et la théorie de la relativité générale,( comme on l’appela) est née.

De la relativité restreinte à la relativité générale

On comprend la théorie de la gravitation, il y a plus de 300 ans, Einstein changea complètement la manière dont nous la considérions. En effet, la relativité générale, nous dit que les ondes gravitationnelles ne sont pas des ondes comme les autres, mais une conséquence du fait que l’espace-temps n’est pas plat, en effet, en envisage que celui-ci est courbe. Cela implique donc que l’espace lui-même est capable de se déformer, se contracter, vibrer …, comme un objet matériel( voir image ci-dessous). Cette constatation fut un renversement sans égal dans l’histoire des sciences étant donné qu’il contredit les croyances de la physique de Newton, qui considérait l’espace en tant qu’un cadre immatériel où se dérouleraient les phénomènes matériels.

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Illustration des corps massifs sur  l’espace-temps

Une des prédictions de la relativité générale dit que le temps devait apparaître moins coulant près d’un corps massif ( comme la Terre par exemple) à cause de la relation entre l’énergie de la lumière et sa fréquence car plus l’énergie est grande, plus la fréquence est haute. Pour illustrer cela, Einstein nous présenta le  »paradoxe des jumeaux », qui n’est un paradoxe que pour qui croit en un temps absolu. En effet, celui-ci, nous présente deux jumeaux dans deux situations différentes mais qui ont les mêmes conséquences : premièrement imaginons qu’un des jumeaux aille vivre au sommet d’une montagne et que le second reste au pied de celle-ci( au niveau de la mer), alors celui qui habite au sommet de la montagne vieillira plus vite que le second. Donc lorsqu’ils se rencontreront à nouveau, l’un devrait être plus vieux que l’autre, même si la différence d’âge entre eux devrait être minime. Or dans un deuxièmes cas, si nous imaginons que l’un d’eux partait pour un long voyage à bord d’un vaisseau spatial à une vitesse proche de la vitesse de la lumière; à son retour il devrait être beaucoup plus jeune que son frère resté tranquillement sur Terre !

Nous avons d’ailleurs quelques observations qui confirment les descriptions précédentes, en effet en 1962, elles furent mises à l’épreuve lorsqu’une paire d’horloges atomiques identiques très exactes furent placé l’une au pied et l’autre au sommet d’une tour. Ils observèrent alors que l’horloge placée au pied de la tour et donc plus proche de la Terre fonctionnait plus lentement, elle était donc en accord avec la relativité générale. Comme la lumière vers le haut dans le champ gravitationnel de la Terre, elle perd de l’énergie et ainsi sa fréquence baisse, ce qui signifie que la longueur l’intervalle de temps entre une crête d’une onde et la suivante augmente. Nous avons également une confirmation cette fois-ci du deuxième cas du paradoxe des jumeaux, lorsque une paire de horloges atomiques très exactes furent placées la première à bord d’un avion et la deuxième sur le sol. Suite à un voyage d’aller-retour, à une vitesse et altitude significative, on observa une différence signifiante entre l’heure que pointait les horloges qui était pourtant identiques.

En relativité, il n’y a donc pas de temps absolu, chaque individu a sa propre mesure personnelle du temps qui dépend du lieu où il est et de la vitesse à laquelle il se déplace. Ainsi, contrairement à toutes les anciennes théories, même celle de la relativité restreinte, le temps et l’espace sont désormais des entités dynamiques : quand un corps se meut, ou quand une force agit, cela affecte la courbure de l’espace et du temps, et en retour la structure de l’espace-temps affecte la manière dont les corps se meuvent et dont les forces agissent. Ce qui implique que l’espace et le temps n’affectent pas seulement tout ce qui se passe dans l’univers mais qu’ils en sont également affectés. La relativité générale est cependant plus complexe avec des conséquences bouleversantes comme une nouvelle perception de l’orbite relative des planètes ou alors le sous-entendu que l’univers a eu un début dans un temps fini et éventuellement une fin dans un moment précis dans le futur. Néanmoins, ne nous aventurons-pas dans ses sujets controversés, mais essayons par la suite de comprendre le cas précis des trous noirs.

Trous noirs et distorsions du temps

Le champ gravitationnel d’une étoile modifie dans l’espace-temps les trajectoires des rayons lumineux par rapport à ce qu’ils auraient été si l’étoile n’était pas là-bas. Les cônes de lumières, qui indiquent les trajectoires des rayons lumineux dans l’espace et le temps issues de leur sommet, seront alors déviés vers l’intérieur de l’étoile. Donc au fur et à mesure que l’étoile se contracte, le champ gravitationnel à sa surface devient plus intense et le cône de lumière sera davantage dévié vers l’intérieur. Il sera alors plus difficile à la lumière de s’échapper de l’étoile, et elle deviendra alors plus rouge et plus sombre pour l’observateur lointain. Lorsqu’une étoile assez massive arrivée meurt, elle a tendance à s’attirer sur elle-même comme si la terre s’attirait en son noyau. Cet effondrement gravitationnel de certaines étoiles massives qui explosent en supernova sont à l’origine des trous noirs,des astres extrêmement compacts dont l’intense champ de gravitation empêche tout rayonnement de s’échapper, y compris la lumière. Comme nous l’avons déjà évoqué le temps coule plus lentement dans un champ gravitationnel fort. Alors comment se comporte l’espace-temps autour d’un trou noir qui a un champ gravitationnel extrêmement fort? Et bien on a une accélération du temps extrêmement forte. Donc en ajoutant sa masse,et sa densité presque infinie, la déformation que celui ci provoquera à l’espace-temps, courbe et élastique sera surprenante. En effet, dans le graphique suivant nous pouvons observer une presque rupture de l’espace dans un trou noir. Ou singularité désigne un point spécial dans l’espace-temps dans lesquels certaines quantités décrivant le champ gravitationnel deviennent infinies.

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Représentation de la déformation de l’espace-temps dus à la présence d’un trou noir

Toutes ses découvertes du XXe siècle sont si surprenantes qu’elles nous font penser à l’impossible. Une quatrième dimension? Voyager dans le temps? ou bien un meilleur moyen de voyager à travers l’espace? Par la suite nous découvrirons les hypothèses sur ce sujets ainsi que les différentes théories impliquées.

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«Pour nous, physiciens dans l’âme, cette séparation entre passé, présent et avenir, ne garde que la valeur d’une illusion, si tenace soit-elle » – Albert Einstein